Une formation qui ne vole pas haut

J’ai la chance et le privilège de pouvoir faire un voyage avec ma douce de temps de temps. On prend l’avion vers une destination ensoleillée et hop 1 semaine de repos complet avec comme seules préoccupations se rappeler des heures du buffet et d’ajouter une couche de crème solaire régulièrement. Ce que j’oublie chaque fois et ce que mon corps me rappelle en m’empêchant de dormir convenablement pendant quelques jours ensuite.

La pandémie de 2020 a forcé une pause de quelques années dans nos habitudes et celles de millions de voyageurs. Habitudes?
Non… il faut cesser de penser que c’est une habitude ou un droit.
C’est un privilège.
Un réel privilège.
Peu de gens sur la planète peuvent se permettre ce luxe. On a parfois l’impression que tous nos amis et voisins voyagent plusieurs fois par an et que c’est normal de le faire. Eh non! L’amélioration de la qualité de l’air et des eaux pendant les premiers mois de pandémie et de confinement a démontré que l’activité humaine reliée au transport est une énorme source de pollution. Cette dette environnementale que nous contractons tous avec nos «habitudes» sera payée par nos descendants… qui nous en voudront probablement toute leur vie!
Une de ces habitudes de gaspillage inutiles m’a frappé encore une fois en prenant l’avion.
L’habitude de faire perdre du temps aux gens et l’habitude de les prendre pour des imbéciles.
Je parle de la formation de sécurité dans les avions.
Quelle est la proportion des gens qui écoutent les consignes?
Oh, oui, bien sûr, la première fois que vous prenez l’avion.
Et la seconde… pour réaliser rapidement que la formation est
Ennuyeuse : il est évident que la personne qui parle répète un script idiot sans se donner la peine d’y mettre un peu d’énergie
Ennuyeuse (non je ne répète pas pour rien!) : la personne qui mime les instructions est tout aussi enthousiaste et sourit à peine
Ennuyeuse (j’insiste) : presque personne ne porte attention… pourquoi y mettre des efforts et de l’enthousiasme!
Toujours la même : ils ont beau nous dire que cet avion est différent des autres, les jets de tourisme ont tous des ailes, des masques, des ceintures, des sorties et des lumières au sol, etc.
Presque inutile puisque

tout le monde sait se servir d’une ceinture de sécurité
en cas de décompression on hyperventile tellement que mettre un masque sera probablement au-delà de nos capacités de concentration
le gilet de sauvetage… oh boy… se pencher pour l’attendre est impossible pour toutes les personnes qui ont un indice de masse corporelle trop élevé et de toute façon… le siège du passager devant vous est tellement proche du vôtre que vous n’atteindrez pas… atteindrez pas quoi au juste? La petite sangle qui dépasse? Qui a déjà vu cette sangle en passant?? Qui s’est déjà pencher pour la voir et tenter de l’attendre?
Ok, ok… j’ai essayé, mais ma douce m’a dit d’arrêter tout de suite.

Et puis dans le fond…si l’avion s’écrase , quelles sont nos chances de survie (voir plus bas)?
Bref… une formation apparemment inutile, ennuyeuse (bin oui, 3 répétitions!) et un auditoire captif, mais inattentif.

Donc… pourquoi insister ?

Pour améliorer les choses et l’intérêt, des passagers de certaines compagnies innovatrices ont essayé plusieurs alternatives.
Je vous invite à écouter ces vidéos dans une position et un endroit qui permettent les éclats de rire, les éructations et les dégâts, car il pourrait y avoir des déversements de liquides de toutes sortes (oui, de toutes sortes… wink wink).

Mais en fin de compte, je persiste et signe.
Formation inutile…ou en grand besoin de révision!

J’évolue dans le domaine de la formation par adulte depuis 1996. Ma première expérience de communication pour des adultes remonte à 1987 cependant alors que je tentais de présenter des concepts de biologie moléculaire à un auditoire d’étudiants en maîtrise. Pas facile de démontrer les interactions entre les protéines régulatoires et la chromatine qui entoure un gène. À cette époque le concept même d’interactions entre protéines régulatrices, appelées facteurs de transcription, et l’ADN était étrange et mystérieux. Et mon prof qui ne croyait pas à ce que je proposais!

3 ans plus tard, je dois présenter à un congrès en œnologie (la science du vin) à Bordeaux (la ville pas la prison! Je dois spécifier car j’ai embarqué un ponceux peu de temps après le congrès et quand il m’a demandé ce que je faisais je lui ai dit que je revenais de Bordeaux et son regard s’est allumé… MOI aussi m’a-t-il répondu!!… Mais lui il parlait de la prison!!) Notre nouvelle technique d’identification moléculaire des levures de vins. L’auditoire est composé de spécialiste en microbiologie et en oenologie traditionnelle…pas des experts de cette nouvelle science qu’est la biologie moléculaire (on parlait de PCR à cette époque (ouais , on était très très hot!!)et c’était presque perçu comme un rite satanique!)
J’ai compris lors de ces deux évènements que le contenu importait peu si on ne parvenant pas à le communiquer adéquatement.
Un copain me faisait remarquer que tout est dans l’intention, la conviction et l’énergie. Oh, on parlait des solos de guitare, mais le concept de ICE s’applique aussi à la formation.
Intention : pourquoi faire un solo… ou une formation
Conviction : être convaincu c’est aussi savoir de quoi on parle, avoir l’Expertise et l’Expérience requise pour passer le massage… encore une fois, ça s’applique à la musique et à la formation!
Énergie : la bonne énergie pour le bon message… savoir quand y mettre du pep et comment contrôler le niveau d’énergie pour y mettre l’emphase adéquate

Reprenons chaque de ces paramètres

INTENTION

Pourquoi faire une formation sur la sécurité dans les avions?
Pour améliorer la sécurité des passagers pendant le vol et dans l’éventualité d’une décompression ou d’un amerrissage forcé.
Hmm…. je reviendrai là-dessus.
Noble intention de toute façon!

CONVICTION

Il est probable que les agents et agentes de bord ont l’expérience et l’expertise pour nous communiquer l’information. Sont-ils/elle convaincus de la nécessité de nous passer le message? Peut-être, mais les performances auxquelles j’ai assisté dans les multiples vols depuis 1980 (premier vol pour un échange étudiant à Vancouver!) me porte à douter de leur conviction…

ÉNERGIE

J’avoue que le sujet est sérieux… trop sérieux pour des vacanciers pressés d’arriver à destination? Mais “sérieux” est-il nécessairement synonyme d’ennuyeux? Pas du tout! Le sujet est sérieux, mais la livraison du message elle, peut-être créative, amusante, dynamique… tout pour que le contenu soit transféré…

E=M2C

Un collègue aimait utiliser la formule E=M2C, analogue à la fameuse équation d’Einstein :
Energie = Memorable and Meaningful Content
Oui on est tous d’accord que les consignes de sécurité sont importantes et significatives pour tous, mais rien de mémorable n’est présent dans la «formation» (gros guillemet ici parce que dans ma tête, ce n’est pas une formation, c’est à peine une démonstration) qu’on nous sert à chaque vol sur un plateau insipide (à l’image de ce qu’on nous offre maintenant comme bouffe dans les avions?).
Oh oui… On finit bien par s’en souvenir… le contenu est simple et tellement répétitif….
Simple?
Assez simple de mettre un masque de plastique (qui ressemble davantage à un verre qu’un masque …mais bon) sur le nez… oui.
Assez simple d’enfiler un gilet de sauvetage et de tirer sur le mécanisme de gonflement automatique ou de souffler dans le tube pour gonfler manuellement le gilet de sauvetage?
Euh… non.

Non,

NON!!!

De plus, le fait d’enfiler son masque avant d’aider son enfant n’est définitivement pas un réflexe! Il faut avoir vécu une situation d’urgence au moins une fois dans sa vie pour savoir que le réflexe est de se sauver et d’aider les autres avant de penser à mettre un masque sur son nez et d’ajouter l’étanchéité (inexistante de toute façon si vous pensez 30 secondes à ce que le masque ressemble)…
Et imaginez seulement comment vous allez souffler dans le gilet pour le gonfler si le mécanisme automatique ne fonctionne pas… la plupart des gens ont de la difficulté à gonfler plus d’un ballon d’anniversaire sans changer de couleur et, sans même savoir le nombre de litres nécessaires pour gonfler un gilet de sauvetage, je doute qu’une personne stressée par un amerrissage forcé ait suffisamment de prise de conscience pour souffler dans un petit tube (en supposant que la personne puisse porter le tube à sa bouche…) plusieurs fois de suite… tout en regardant autour d’elle si ses enfants ou autres passagers chers à ses yeux sont visibles…

Je reviens donc à l’intention…
Améliorer la sécurité des passagers.

J’ai conçu quelques formations en santé/sécurité dans le passé dont une série en protection respiratoire. Le simple fait d’ajuster une sangle de masque doit être pratiqué plusieurs fois.Seulement une sangle élastique (qui risque d’avoir perdu de son élasticité si les masques ne sont pas vérifiés régulièrement ) alors que même les masques que nous avons utilisés pendant la pandémie en ont 2!
Ajuster son masque pour l’étanchéité est encore plus compliqué. Nous en avons tous fait l’expérience depuis mars 2020…la petite tige de metal autour du nez, les trous sous le menton, le port de la barbe…etc…nous avons tous acquis pas mal d’expérience avec les massages à cause de la COVID.
Penser à sa propre sécurité avant d’aider les autres est un réflexe qui ne peut être inculqué sans plusieurs simulations. Le nombre de personnes qui sont décédées par manque de sécurité personnelle en tentant de sauver les autres est hallucinant! Des évènements récents le confirment encore.

Penser qu’une formation de 2 minutes avant de partir en voyage peut avoir un impact est… optimiste.
Penser qu’il est possible de former sur ces importants concepts sans faire pratiquer est… hmmm.. je tente de trouver le mot adéquat sans paraître trop insultant. Je n’y arrive pas! Je vous laisser en trouver un. Insérez ce qui vous passe par la tête dans l’espace suivant ________________________

Si l’intention est vraiment la sécurité des passagers, il faut les faire pratiquer.

Au moins une fois!

À cet égard, rappeler à des gens moyennement intelligents comment boucler une censure de sécurité est… inutile, voire irrespectueux. Mentionner simplement de boucler une ceinture suffirait à la rigueur… même si ce rappel est entendu dans tout l’avion à chaque fois qu’une zone de turbulence survient.

Vous remarquerez que très peu de temps, ou pas de temps du tout, est consacré à la position des passagers en cas d’atterrissage forcé… vous savez, ce qu’on voit sur les feuillets plastifiés dans la poche devant chaque siège… juste devant le sac à vomi!

Tentez de vous pencher et de toucher vos genoux avec les coudes pour voir… le siège devant vous est tellement proche du vôtre que simplement resté assis droit est peut-être la meilleure position… comme si vous aviez le choix…!

Parlons maintenant du gilet de sauvetage… ooh boy!! Si un court essai de masque peut rapidement vous faire prendre conscience de la bonne façon de le porter une fois éjecté automatiquement au-dessus de vos têtes, le gilet de sauvetage est une tout autre affaire!!
1— Où est le gilet?
Sous votre siège.
Si votre abdomen n’est pas trop protubérant, vous avez une chance de pouvoir atteindre la languette et tirer dessus sans manquer de souffle. (Un doute m’assaille… si vous avez déjà mis le masque, le tube est-il assez long pour attendre la languette? Et si oui, qu’arrive-t-il au tube si vous enfilez le gilet de sauvetage??… Ou alors il faut mettre le gilet de sauvetage avant le masque… mais si la décompression perdure et que vous prenez trop de temps pour mettre le gilet vous perdrez connaissance avant d’avoir pu mettre le masque… Arghhhhhhhh!!!!). Mais si vous avez réussi à adopter la position du bon passager en situation d’écrasement ( voir plus haut) vous avez de fortes chances de pouvoir atteindre la languette!

Et si vous activez le mécanisme d’autogonflement avant de sortir… nous allons tous mourir étouffés!!!

Oh, mais attendez…

Ceci étant dit je me suis demandé quelle étaient les chances de survive à un amerrissage forcé. On entend régulièrement parler des écrasements d’avion et la plupart du temps on nous dit qu’on ne retrouve pas l’avion en mer ou que tous les passagers sont morts.
Je me suis donc demandé pourquoi former les passagers si les chances de survie étaient nulles? Nous aurions tous avantage à apprendre à méditer sur le sens de l’existence pour les 7 minutes qui nous restent et regarder nos voisins, les êtres aimés avec qui on voyage, avec un grand sourire serein plutôt que paniquer en tentant d’enfiler un gilet de sauvetage sont la couleur rappelle… bien, rien de significatif. (en effet, on dit une peur bleue ou un rire jaune alors pourquoi un gilet jaune… oh… comme dans protestation ?)

Je me suis donc tourné vers une recherche sur les taux de survie lors d’écrasement ou d’amerrissage forcé.
Étonnamment, on survit bien à un écrasement d’avion. Environ 95 % de chance en fait!
“Les chances de mourir dans un accident d’avion sont d’environ une sur 11 millions, mais les chances de survie dépendent du choix des sièges. Un expert en aviation révèle un taux de mortalité de 44 % pour les voyageurs assis dans les sièges du couloir au milieu de l’appareil, contre 28 % pour les sièges centraux à l’arrière. “

https://www.dailymail.co.uk/sciencetech/article-11718755/Seat-seat-scientists-reveal-risk-dying-airplane-crashes.html

Considérant les faibles chances que ça arrive (1/11 000 000) ça vaut peut-être la peine d’écouter avec attention les 5 minutes de formation insipide qu’on nous dispense au début de chaque vol…et de choisir un des 8 sièges moins dangereux près de la queue de l’avion (donc dans les derniers passagers à embarquer et qui risquent de ne plus avoir de place dans les compartiments de bagages au dessus des sièges!)

Douce consolation…les sièges les moins sécuritaires sont ceux de la première classe!!

Mais franchement ça ne vole pas haut comme formation.

Une simple formation pratique obligatoire de 15 minutes une fois tous les dix ans ferait le plus grand bien..après tout on attend 3 heures avant d’embarquer dans l’avion de nos jours..pourquoi ne pas profiter?
Partie 1: Décompression!

1.1 Recevoir un masque à oxygène en pleine face sans avertissement et le mettre correctement. Points bonus si vous réussissez à ne pas hyperventiler.

1.2 Simulation avec des passagers nécessitant de l’aide, etc. Avec chronomètre et détecteur d’oxygène sanguin pour mettre un peu de stress…après tout, on ne sera pas trop relax si ça arrive pour vrai!!

Partie 2: Le gilet jaune!

2.1Exercice de flexibilité pour atteindre le gilet sous le siège
2.2 Enfiler le gilet et ajuster la sangle sans frapper les voisins qui paniquent.
2.3 Gonfler le gilet de sauvetage en soufflant dans le tube…au cas où…
Points bonus si vous hyperventilez (pas de point poru le 1.1 cependant) dans le gilet!!
Point bonus également si le gilet est gonflé en moins de 30 secondes.

2.32 Répéter 2.2 et 2.3 mais avec un masque à oxygène sur le nez… (just kidding)
Partie 3 : un vidéo envoyé aux passagers avant chaque vol devrait combler le besoin de formation et servir de rappel.

Pourquoi tolère-t-on de mauvaises formations après tout?

Une mauvaise, très mauvaise habitude à briser.
Si l’Intention est de former les gens

Si la Conviction y est

Si l’Énergie est au bon niveau pour communiquer

La formation sera valable et mémorable.
Il faut briser la glace et instaurer le principe de ICE (intention, Conviction, Énergie) je ne peux résister à la tentation de faire un acronyme cool (et de faire une Daddy’s blague).
Bon , je sais…vous allez me demandez pourquoi j’ai pensé à ça en partant pour Cuba. Ma blonde aussi me l’a demandé…mais ça ne devrait plus se reproduire car j’ai exorciser tout cela en écrivant un court blog de 2600 mots.
Merci d’avoir lu jusqu’à la fin.

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Une formation qui ne vole pas haut